Comment déterminer la taille d’un filtre ?

C’est LA question la plus fréquemment posée par ceux et celles qui souhaitent à la fois être certain que l’eau du bassin soit bien claire et que « tout se passe bien ». Et plus particulièrement à ceux qui souhaitent construire un filtre à l'ancienne type multichambre, ou ceux qui par simple curiosité, souhaitent vérifier la conformité d'un filtre du commerce.

Un bassin avec de l’eau claire est facile à obtenir : mais que le « tout se passe bien » est une autre affaire. Pour comprendre cela, vous aurez dû aborder notre page consacrée à la filtration mécanique et biologique avant  de poursuivre cette page.

La filtration mécanique devra éliminer ou retenir toutes les particules en suspension, tandis que le filtre bio devra – au moyen de bactéries – éliminer les substances toxiques contenues dans l’eau (ammonium et nitrites), et les deux systèmes nécessitent des approches différentes.

Une chose est claire: on ne filtre pas un bassin avec un "truc" de la taille d'une boîte à chaussures !  En fait, la vraie question à se poser est d'abord de savoir quelle quantité de nourriture maximale va être distribuée quotidiennement, et dans quel volume d’eau: c'est véritablement ce qui permet de déterminer la taille du filtre.

Sur Internet vous trouverez des méthodes diverses sur le sujet: le problème est que, selon le procédé utilisé, l’écart des résultats obtenus peut aller du simple au double !  Une telle différence est due au fait que les données de base et surtout, la manière de calculer ces paramètres décisifs (durée de recyclage, proportion d’ammoniac issue de la nourriture etc, ) varie largement. Cela conduit inévitablement à des solutions de tailles différentes.

Méthode par un exemple

Il est envisageable de tenter une approche réaliste; cela reste néanmoins une méthode empirique, elle n'a donc aucune valeur scientifique. Sinon, il faudrait non seulement tenir compte du type de nourriture, mais aussi le pH, la température, l’alcalinité, la concentration d’oxygène, la durée de recyclage, le type de média, sa porosité, la vitesse de l’eau, le type de circulation dans le filtre, le volume du bassin,  les insectes ou végétaux morts dans le bassin etc.  Bref un sacré casse-tête !

La méthode proposée depuis plus de 15 ans se révèle efficace et réaliste. Elle est spécifique aux bassins à Koi et non à l’aquaculture qui fonctionne différemment.

Aujourd’hui en 2024 nous l’avons adaptée aux nouveaux matériaux modernes mais la méthode de calcul est la même depuis 15 ans. Elle consiste en plusieurs étapes.

- déterminer la densité d'empoissonnement, donc la quantité de nourriture à traiter par jour.
- déterminer le volume de la filtration mécanique et biologique.
- vérifier si le filtre répond à quelques repères de base.

Données de base

Pour évaluer la taille d’un filtre biologique, il faut connaître la quantité d’aliments versée dans le bassin chaque jour. Pour cela, on tient compte du nombre de poissons et de leur taille. Ces Koi finiront normalement tous par atteindre des tailles respectables, donc il serait absurde de sous-évaluer le dimensionnement du filtre en tenant compte de poissons de 15 cm. Mais à titre d’information, nous indiquerons ci-dessous le rapport moyen entre la taille et le poids des Koi.

La bonne pratique indique que la quantité d’aliments à fournir, par jour, dépend de la température et en été, lorsque les besoins des Koi sont importants, on estime qu’il faut donner une quantité d’aliment dont le poids équivaut entre :

1 à 1,5 % de la masse corporelle des poissons contenus dans le bassin (*)

3  à 5 % pour les plus jeunes ( moins de 15 cm)

(*) Certains donnent encore plus, mais dans le but d’un grossissement rapide à l’occasion de Koi Show par exemple.

Cette quantité varie avec la température de l’eau mais dans tous les cas, la nourriture devrait être distribuée chaque jour en plusieurs fois :

1 fois par jour ou tous les 3 jours selon l’appétit de 7° à 10°C

1 à 2 fois par jour de 10 à 15°C

3 à 4 fois par jour entre 15°C et 27°C

1 à 2 fois par jour au-dessus de 27 – 28°C  (on réduit la quantité en raison de la baisse de la concentration d’oxygène dans l’eau plus chaude, ce qui réduit l’assimilation de la nourriture).

Alimentation à verser dans le bassin qui doit être normalement consommée entre 5 et 10 minutes, (les grandes Koi mangent plus lentement) sinon à corriger.

Enfin, le pourcentage de protéines contenu dans l’alimentation est variable (environ de 28 à 45%) : on adapte ce pourcentage également en fonction de la température de l’eau.

Taille - cm 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75 80 85 90
Poids - grammes 15 65 150 290 480 700 1100 1550 2200 2900 3700 4600 5900 7000 8500 10300 12000

L’alimentation en granulés distribuée aux poissons produit environ 37 g d’ammoniac par 1000 g de nourriture (on admet une nourriture à 40 % de protéines).

Connaissant la vitesse de nitrification selon des cinétiques établies expérimentalement (en fonction du pH, de la température, de la concentration en oxygène - voir cycle de l’azote) et, connaissant diverses caractéristiques (constantes) concernant le métabolisme des bactéries, on retient qu’une surface de 4 à 5 m² de support bactérien est susceptible de recevoir un biofilm bactérien capable de transformer 1 g d’ammoniac à une température de 22°C en 24 heures.

Cette surface de référence suffit même pour les supports bactériens lisses (les moins favorables), à une concentration minimale d’oxygène dans le filtre de 4 mg/l ainsi qu'un KH de 6° minimum.

Lors de la conception d’un bassin, il est normal de s’attacher tout d’abord à des considérations esthétiques ou pratiques; il ne faut cependant pas perdre de vue que pour un volume d’eau précis, une densité de population est à respecter.

En introduisant trop de poissons dans votre étang, vous vous exposez inévitablement à des problèmes: une règle empirique simple indique de maintenir un Koi par mètre cube d’eau maximum. L'idéal étant une densité plus faible de 1 Koi par 2 ou 3 m3 d'eau. On lit souvent ici ou là, une densité de 1 Koi par m3 : c’est de trop !

Problème d’algues, problèmes sanitaires, filtre biologique souvent bien trop petit….

Si vous décidez malgré tout de ne pas suivre cette simple règle de bon sens, il faudra surdimensionner votre installation et changer régulièrement une partie plus importante d’eau.

Déterminer la quantité d'ammonium à traiter

Selon la composition de l'alimentation, seule une fraction de nourriture est assimilée par les poissons. Une partie est donc éliminée dans le bassin, sous différentes formes, nous retenons la répartition d'azote suivante:

+/- 30% retenue  

+/- 10% éliminés par les fèces,

+/- 30% excrétée en azote ammoniacal 

+/- 30% perdue sous forme d'azote organique dissous.

Soit approximativement 70 % de résidus à traiter: de ce pourcentage nous estimons la quantité d'azote N que le filtre biologique doit transformer. Ceci pour un aliment usuel contenant 40 % de protéines.

Un aliment spécifique contenant un pourcentage très élevé en protéines (alimentation spécifique pour alevins > 50%) nécessitera donc  une adaptation de la taille de la filtration.

La méthode utilisée est celle décrite par Kjeldahl (1883), et par convention, il est admis que les protéines contiennent 16% d'azote (la teneur en azote des protéines varie de 14 à 18 %)

Selon ce qui précède retenons que 1000 g de nourriture génèrent 37 g d’ammonium / ammoniac

Afin de vous aider, voici un exemple pratique qui pourra vous servir: soit, un bassin de 18 m³ pouvant accueillir maximum 10 Koi de 60 cm. Dans les conditions les plus défavorables afin d’être certain que le filtre biologique ne soit pas un peu juste.

Soit pour 555 g d’aliment > 20,6 g à traiter pour notre exemple.

Déterminer la surface de supports biologiques

La surface de support bactérien nécessaire pour assurer cette opération: 20,6  x 5 = 103 m². 

Ensuite, il suffit de déterminer le volume de support bactérien qu’il est utile d’installer pour obtenir cette surface. Les données des supports les plus utilisés en lits fixes ou mobiles permettent cette opération.

Matala noir: 190 m² / m³

Matala bleu: 380 m² / m³

Matala vert: 295 m² / m³

Matala gris : 470 m2 / m3

Tapis japonais: 275 à 300 m² / m³

Hel-X 17: 595 m2 / m3      

Hel-X 13: 956 m2 / m3

Biocerapond 1400 m2 / m3

Hel-X Flocons 5000 m2 : m3

Déterminer le volume du filtre

En fonction des performances des supports, on verra qu’un filtre peut voir son volume diminuer ou augmenter.

Attention, le volume brut d'une chambre ne peut contenir que 50 à 60 % du volume de tapis (puisque l'on intercale 1 tapis avec un espace d'eau)... dans ce cas, il faut donc adapter le volume du filtre.

Dans le cas des Hel-X vous ne pourrez obtenir de bons résultats qu'en versant 40 % de medias dans un volume brut (ex: 400 litres d' Hel-X maxi dans 1000 litres d'eau). On peut pousser à un remplissage de 50 % en forçant un peu sur l'aération.

En retenant le tapis japonais classique: il faudrait pour obtenir les 103 m² de surface de notre exemple: (1000 / 275) x 103 = 375 litres de tapis japonais.

D’autres caractéristiques doivent encore attirer votre attention: le débit de pompage, la vitesse de l'eau dans le filtre et le temps de contact entre le support bactérien et l’eau à traiter.

Un temps de contact compris entre 5 et 10 minutes est une très bonne référence en utilisant des supports repris dans la liste ci-dessus. En utilisant des supports dont la surface de colonisation est médiocre, (morceaux de tuyaux plastiques non poreux) ce temps de contact peut grimper à 20 minutes ! En utilisant des medias performants ce temps peut être réduit à 2 ou 3 minutes. N'oublions pas que le filtre biologique n'abat pas toute la pollution en 1 seul passage de l'eau dans le filtre. Les filtres Combi modernes (tambour avec chambre bio intégrée) sont très efficaces malgré un temps de contact frôlant parfois la minute ! 

Ce temps de contact de 5 à 10 minutes vaut surtout pour les multichambre où l'on tente de sédimenter les particules alors qu'avec un tambour, les plus petites particules sont retenues et évacuées régulièrement. c'est une grosse différence.

Une vitesse d'eau moyenne dans le filtre biologique de 0,02 mètre / seconde maximum est également correct.

Le débit de pompage: le volume du bassin doit passer dans le filtre toutes les deux heures minimum (trois heures au grand maximum pour les très gros volumes > 100 m3).

En filtrant un bassin en 1 heure, on réduit les particules en suspension surtout si la filtration mécanique est performante (tambour ou filtre à tamis sans fin).

Ce qui précède démontre encore une fois qu’un filtre de petite dimension ne peut pas convenir: même en le remplissant d’un média très performant en termes de surface, il devient impossible d’établir une relation correcte entre le temps de contact, le turn-over du bassin et la vitesse de l’eau dans le filtre.

Harmoniser volume et temps de contact

Revenons à notre exemple pratique: si nous retenons pour notre bassin de 18 m3, un débit de pompage de 9 m3/heure soit / 3600 pour obtenir 0,0025 m3 / seconde.

A une vitesse de 0,02 mètre / seconde, la section minimale du filtre est de (0,0025 / 0,02) soit 0,125 m2. (Cas d'un filtre à chambre unique avec déplacement horizontal de l'eau)

Pour obtenir cette section, nous pouvons par exemple opter pour largeur x hauteur = 35 cm x 36 cm (= 0,126 m2). Ceci est un exemple, optez toujours pour des dimensions les plus grandes qui soient, le flux d’eau sera plus lent…

Comme le volume de tapis est de 375 litres soit 0,375 m3, la longueur du filtre est donnée par (0,375 / 0,126) soit 3,19 mètres, soit 297 cm. Bien entendu nous pouvons élargir ou augmenter la hauteur du filtre afin de diminuer sa longueur... La vitesse de l'eau étant ralentie, cela ne pose aucun problème.

Ne pas oublier d'inclure à cette hauteur utile théorique, la hauteur d'eau sous les tapis (du fond du filtre à la grille de maintien, compter une dizaine de cm) ainsi que la hauteur comprise entre le dessus des tapis et le bord supérieur du filtre (5 à 10 cm en moyenne). Tout cela est théorique: l'exemple proposé peut être exploité tel quel pour des medias tels que les céramiques: mais comme indiqué ci-dessus, les tapis nécessitent un espace entre deux éléments,  il faut donc augmenter encore le volume du filtre en fonction de ces espaces.

Dernière donnée qui permet d'évaluer un bon filtre multichambre, le temps de contact. Ce temps, compris entre 5 et 10 minutes permet de bons échanges entre l'eau et les supports.

Dans notre exemple: admettons que l'eau circule horizontalement dans ce long filtre qui mesure 0,35 m x 0,36 m x 3,19 m soit un volume utile de 401 litres.

Ajoutons 2 x 10 cm d'espace sous les grilles et au-dessus des masses filtrantes, cela donne maintenant: 0,35 x 0,56 x 2,97 = 0,582 m3 soit 582 litres. Ceci pour un débit de 9 m3/heure soit 150 litres / min.

Le temps de contact est de 582 / 150 = 3,88 minutes. Ce temps est peu faible... Rien de grave car il nous reste encore à élargir le filtre puisque les tapis doivent être espacés les uns des autres.

Si nous passons à 0,45 m de large x 0,6 m de haut x 2,97 m de long, soit 0,801 m3 soit 801 litres, cela donne maintenant 748 / 150 = 5,34 min.

Evaluer la vitesse du flux d'eau

La vitesse de l’eau n’est pas à confondre avec le débit !

Voici comment évaluer la vitesse moyenne de l'eau dans un filtre:

- mesurer la section du filtre (ou la surface d'une chambre si l'eau circule verticalement) par exemple 45 cm par 60 cm, cela donne une surface de passage d'eau de 0,27 m2

- vous connaissez normalement le débit de votre installation, par exemple 9 m3/heure soit / 3600 = 0,0025 m3 / seconde

La vitesse moyenne est de 0,0025 / 0,27 m2 = 0,009 m / seconde.

Dans la section hydraulicité, vous trouverez des infos concernant les tuyaux à utiliser pour la réalisation du bassin.

Concentration d'oxygène

Sans rentrer dans les détails, un filtre biologique DOIT être aéré, même un filtre à lit fixe !

Les bactéries consomment 4,33 g d’O2 pour transformer 1 gramme d’ammoniac.

La méthode ci-dessus vaut pour des filtres multichambres à lits fixes ou des moving bed normalement aérés. Peu importe la filtration mécanique qui doit précéder : à brosses, à préfiltre ou à tambour, toujours aérer les supports biologiques : cela contribue à apporter de l’oxygène, à diminuer d’éventuels chemins préférentiels dans le filtre et de développer le biofilm.

Dernières remarques !

 Nous avons calculé le volume d’un filtre pour des conditions « presque extrêmes » : dosage de nourriture de 1,5 %, pourcentage de protéines élevé etc  mais pour un rendement de nitrification estimé « moyen ». Donc avec des paramètres d’eau moyens et un bassin normalement bien propre contenant une densité normale de Koi.

Si le pH (ou la dureté KH…)  de l’eau n’est plus optimal, si le bassin contient beaucoup de matière organique, le schéma ci-dessus devient juste.

A vous maintenant de décider s’il est utile ou non de légèrement surdimensionner ce filtre pour palier à ces points négatifs qui peuvent toujours subvenir. En pratique, on voit trop souvent des bassins surpeuplés avec un fond rempli de vase ou de déchets, les paramètres physico-chiques de l’eau ne sont pas toujours très bien suivis, donc prendre la précaution de surdimensionner n’est pas inutile. Pour ma part, mon filtre est largement surdimensionné de 30%, heureusement, je bénéficie encore d’une eau locale de qualité et je n’ai aucun problème depuis plus de 12 ans.

Enfin, la tendance actuelle est l’utilisation exclusive d’Hel-X, vous verrez sur notre site de vente que la plupart des Combi à tambour comportent ces supports. Cela fonctionne très bien et ces 10 dernières années nous le prouvent. Néanmoins, un mix de tapis japonais et d’Hel-X (50 % - 50 %) est considéré par beaucoup comme l’idéal en matière de filtration biologique.

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