En posant cette question, vous aurez souvent deux types de réponses de la part de certaines enseignes: soit on vous assurera que le petit filtre de 50 cm de long présenté dans le rayon du magasin pourra parfaitement convenir à votre bassin de 25 m3... parce que c'est écrit sur la boîte !

Soit on vous proposera une installation surdimensionnée et très chère....

Entre ces deux "solutions", peut-être bien que le dicton  "qui peut le plus, peut le moins" peut aider à vous décider, mais ne vaut-il pas mieux  tenter une approche plus pragmatique ? 

Une chose est claire: on ne filtre pas un bassin avec un "truc" de la taille d'une boîte à chaussures !  En fait, la vraie question à se poser est d'abord de savoir quelle quantité de nourriture maximale va être distribuée quotidiennement, et dans quel volume d’eau: c'est véritablement ce qui permet de déterminer la taille du biofiltre.

Sur Internet vous trouverez des études diverses sur le sujet: le problème est que, selon la méthode utilisée, l’écart des résultats obtenus varie du simple au double !  Une telle différence est due au fait que les données de base et surtout, la manière de calculer ces paramètres décisifs (durée de recyclage, proportion d’ammoniac issue de la nourriture...), conduisent inévitablement à des solutions qui préconisent des filtres de tailles différentes.

Méthode par un exemple

Aujourd’hui avec le recul, en ce qui nous concerne, il est envisageable de tenter une approche réaliste de la chose; cela reste néanmoins une méthode empirique, elle n'a donc aucune valeur scientifique. Sinon, il faudrait non seulement tenir compte du type de nourriture, mais aussi le pH, la température, l’alcalinité, la concentration d’oxygène, la durée de recyclage, le type de média, sa porosité, la vitesse de l’eau, le type de circulation dans le filtre, le volume du bassin,  les insectes ou végétaux morts dans le bassin etc.  Bref un sacré casse-tête !

Mais cette méthode se révèle efficace et réaliste. Nous l'utilisons depuis une dizaine d'années et elle a pu servir à des centaines de cas différents. La méthode consiste en plusieurs étapes:

- déterminer la densité d'empoissonnement, donc la quantité de nourriture à traiter par jour.
- déterminer le volume de la filtration biologique.
- vérifier si le filtre répond à quelques repères de base.

Afin de vous aider, voici un exemple pratique qui pourra vous servir: soit, un bassin de 18 m³ pouvant accueillir maximum 10 Koi de 60 cm.

Données de base

Un Koï de 10 cm pèse en moyenne 15 g  - un koï de 15 cm pèse en moyenne 70 gr, ensuite, 20  cm / 150 gr,  30 cm / 350 g, 

35 cm / 600 g,  40 cm / 900 g,  45 cm / 1300 g,  50 cm / 2400 g,  55 cm / 3000 g,  60 cm / 4000 g,  65 cm / 5500 g,  70

cm / 7000 g,  75 cm / 9000 g,  80 cm /  11000 g. 

L’alimentation (granulés) distribuée aux poissons produit environ 37 g d’ammoniac/ammonium par 1000 g de nourriture (on admet une  nourriture riche à 40 % de protéines).

Connaissant la vitesse de nitrification selon des cinétiques établies expérimentalement (en fonction du pH, de la température, de la concentration en oxygène - voir cycle de l’azote) et, connaissant diverses caractéristiques (constantes) concernant le métabolisme des bactéries, on retient qu’une surface de 5 m² de support bactérien est susceptible de recevoir un biofilm bactérien capable de transformer 1 g d’ammoniac.

Cette surface de référence suffit même pour les supports bactériens lisses (les moins favorables), à une concentration minimale d’oxygène dans le biofiltre de 4 mg/l ainsi qu'un KH de 6° minimum.

Lors de la conception d’un bassin, il est normal de s’attacher tout d’abord à des considérations esthétiques ou pratiques; il ne faut cependant pas perdre de vue que pour un volume d’eau précis, une densité de population est à respecter. En introduisant trop de poissons dans votre étang, vous vous exposez inévitablement à des problèmes: une règle empirique simple indique de maintenir un Koi par mètre cube d’eau maximum. L'idéal étant une densité plus faible de 1 Koi par 2 ou 3 m3 d'eau.

La quantité d’aliment à fournir dépend de la température et en été, lorsque les besoins des Koi sont importants, on estime qu’il faut donner une quantité d’aliment dont le poids équivaut entre 1 et 1,5 % de la masse corporelle des poissons par jour (3 à 5 % pour les plus jeunes de moins de 15 cm): soit, pour nos 10 kois de 60 cm (40 kg) une ration journalière de 600 g.

Cela paraît énorme mais, c’est le prix à payer pour faire grossir les koi en été car nos hivers sont longs. Le filtre doit donc répondre à cette période critique lorsque la nourriture est distribuée.

Déterminer la quantité d’ammonium

Selon la composition de l'alimentation, (etc etc, car de nombreuses variables interviennent)  seule une fraction de nourriture est assimilée par les poissons. Une partie est donc éliminée dans le bassin, sous différentes formes, nous retenons la répartition d'azote suivante:

+/- 30% retenue  

+/- 10% éliminés par les fèces,

+/- 30% excrétée en azote ammoniacal 

+/- 30% perdue sous forme d'azote organique dissous.

Soit approximativement 70 % de résidus à traiter: de ce pourcentage nous estimons la quantité d'azote N que le filtre biologique doit transformer. Ceci pour un aliment usuel contenant 35% de protéines.

Un aliment spécifique contenant un pourcentage très élevé en protéines (alimentation spécifique pour alevins > 50%) nécessitera donc  une adaptation de la taille de la filtration (mécanique et biologique !)

La méthode utilisée est celle décrite par Kjeldahl (1883), et par convention, il est admis que les protéines contiennent 16% d'azote (la teneur en azote des protéines varie de 14 à 18 %)

Selon ce qui précède retenons que 1000 g de nourriture génèrent 37 g ammoniac/ammonium, soit pour 600 g d’aliment > 22,2 g à traiter pour notre exemple.

Déterminer la surface de support biologique

La surface de support bactérien nécessaire pour assurer cette opération: 22,2  x 5 = 111 m². 

Ensuite, il suffit de déterminer le volume de support bactérien qu’il est nécessaire d’installer pour obtenir cette surface.

Les données de chaque matériaux permettent cette opération.


Matala noir: 140 m² / m³
Gravier: 150 à 200 m² / m³
Matala bleu: 270 m² / m³
Matala vert: 245 m² / m³
Tapis japonais: 275 m² / m³
Tapis Kinshi: 250 m2 / m3
Tapis japonais Top: 300 m2 / m3
Alfagrog: 290 m² / m³
Pouzzolane - Clinopti: 300 m²/ m³
Bioring- Biocarrier: 370 m2 / m3
Matala gris: 460 m² / m³
Kaldnes K3: 584 - 500 P m² / m³
Crystal Bio: 590 m2 / m3
Hel-X 17: 595 - 496 P m2 / m3      
Hel-X 13: 956 - 806 P m2 / m3
Beads Classic: 1000 m² / m³
Biocerapond: 1400 m2 / m3
Beads Top: 1600 m2 / m3  

Déterminer le volume du filtre

En fonction des performances des supports, on verra qu’un filtre peut voir son volume diminuer ou augmenter.
Attention, le volume brut d'une chambre ne peut contenir que 50 à 60 % du volume de tapis (puisque l'on intercale 1 tapis avec un espace d'eau)... dans ce cas, il faut donc adapter le volume du filtre.

Dans le cas des Kaldnes ou Helix, vous ne pourrez obtenir de bons résultats qu'en versant 40 % de medias dans un volume brut (ex: 400 litres d' Helix maxi dans 1000 litres d'eau)

En retenant le tapis japonais classique: il faudrait pour obtenir les 111 m² de surface de notre exemple: (1000 / 275) x 111 = 403,63 litres de tapis japonais.

D’autres caractéristiques doivent encore attirer votre attention: le débit de pompage, la vitesse de l'eau dans le filtre et le temps de contact entre le support bactérien et l’eau à traiter.

Un temps de contact compris entre 5 et 10 minutes est une bonne référence: une vitesse d'eau moyenne dans le filtre biologique de 0,02 mètre / seconde maximum est également correct.

Le débit de pompage: le volume du bassin doit passer dans le filtre toutes les deux heures minimum (trois heures au grand maximum pour les très gros volumes > 100 m3).

En filtrant un bassin en 1 heure, on réduit les particules en suspension surtout si la filtration mécanique est performante (tambour ou filtre à tamis sans fin).

Ce qui précède démontre encore une fois qu’un filtre de petite dimension ne peut pas convenir: même en le remplissant d’un média très performant en terme de surface, il devient impossible d’établir une relation correcte entre le temps de contact, le turn-over du bassin et la vitesse de l’eau dans le filtre.

Harmoniser volume et temps de contact

Revenons à notre exemple pratique: si nous retenons pour notre bassin de 18 m3, un débit de pompage de 9 m3/heure soit / 3600 pour obtenir 0,0025 m3 / seconde.

A une vitesse de 0,02 mètre / seconde, la section minimale du filtre est de (0,0025 / 0,02) soit 0,125 m2. (cas d'un filtre à chambre unique avec déplacement horizontal de l'eau)

Pour obtenir cette section, nous pouvons par exemple opter pour largeur x hauteur = 35 cm x 36 cm (= 0,126 m2). Ceci est un exemple, optez toujours pour des dimensions les plus grandes qui soient, le flux d’eau sera plus lent…

Comme le volume de tapis est de 403,63 litres soit 0,403 m3, la longueur du filtre est donnée par (0,403 / 0,126) soit 3,19 mètres, soit 319 cm. Bien entendu nous pouvons élargir ou augmenter la hauteur du filtre afin de diminuer sa longueur... La vitesse de l'eau étant ralentie, cela ne pose aucun problème.

Ne pas oublier d'inclure à cette hauteur utile théorique, la hauteur d'eau sous les tapis (du fond du filtre à la grille de maintien, compter une dizaine de cm) ainsi que la hauteur comprise entre le dessus des tapis et le bord supérieur du filtre (5 à 10 cm en moyenne). Tout cela est théorique: l'exemple proposé peut être exploité tel quel pour des medias tels que les céramiques: mais comme indiqué ci-dessus, les tapis nécessitent un espace entre deux éléments,  il faut donc augmenter encore le volume du filtre en fonction de ces espaces.

Dernière donnée qui permet d'évaluer un bon filtre, le temps de contact. Ce temps, compris entre 5 et 10 minutes permet de bons échanges entre l'eau et le biofiltre.

Dans notre exemple: admettons que l'eau circule horizontalement dans ce long filtre qui mesure 0,35 m x 0,36 m x 3,19 m soit un volume utile de 401 litres.

Ajoutons 2 x 10 cm d'espace sous les grilles et au-dessus des masses filtrantes, cela donne maintenant: 0,35 x 0,56 x 3,19 = 0,625 m3 soit 625 litres

Ceci pour un débit de 9 m3/heure soit 150 litres / min.

Le temps de contact est de 625 / 150 = 4,16 minutes. Ce temps est peu faible... rien de grave car il nous reste encore à élargir le filtre puisque les tapis doivent être espacés les uns des autres.

Si nous passons à 0,45 m de large x 0,56 m de haut x 3,19 m de long, soit 0,803 m3 soit 803 litres, cela donne maintenant 803 / 150 = 5,35 min.

En espérant que cette démonstration puisse vous éclairer !

Evaluer la vitesse du flux d’eau

La vitesse de l’eau n’est pas à confondre avec le débit ! Voici comment évaluer la vitesse moyenne de l'eau dans un filtre:

- mesurer la section du filtre (ou la surface d'une chambre si l'eau circule verticalement) par exemple 55 cm par 60 cm, cela donne une surface de passage d'eau de 0,33 m2

- vous connaissez normalement le débit de votre installation, par exemple 8 m3/heure soit / 3600 = 0,0022 m3 / seconde

La vitesse moyenne est de 0,0022 / 0,33 m2 = 0,006 m / seconde.

Dans la section hydraulicité, vous trouverez sous formes de schémas quelques combinaisons d’équipements: cette section termine l’aspect filtration du bassin. Si vous rencontrez un problème ou si vous souhaitez des précisions, n’hésitez pas à me contacter: dans le cadre de cet article, il n’est pas possible de passer tous les détails en revue.


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